*LA BATAILLE DE HYERES – 20-21 AOÛT 1944
La prise de Hyères, c’est la porte ouverte sur le camp retranché de Toulon. Dans le souvenir de ceux qui « en » étaient, c’est le Golf-Hôtel orgueilleux, éperon provoquant sur la plaine du Gapeau.
L’honneur des premiers combats sur le sol de France revient aux 2e et 4e brigades, soutenues par les Fusiliers-Marins, qui commencent à se sentir chez eux. Mais il a fallu tout le poids de l’artillerie divisionnaire et des croiseurs de l’Escadre Française pour entamer les défenses de la forteresse.
Alors que les BM 21 et BM 24 sont déjà dans la ville, follement acclamés par la population, le BIMP, qui a atteint la côte 186,3 et domine le Golf-Hôtel monte l’opération qui doit le rendre maître du verrou.
A 19 heures, le 21 Août, c’est chose faite. L’ennemi s’est vaillamment défendu. Le Général Brosset vient en personne le lui dire, et cette fois encore, il avait trouvé plus fort que lui.
Aux Hyérois qui ont vécu ces heures angoissantes et le fol enthousiasme de leur libération, à ceux qui ont connu ces combattants de la 1e DFL, nous remettons en leur mémoire le nom des unités de 1e Division et leurs commandants à cette époque.
Le 19 août, le BM 24 au cours d’une reconnaissance perd trois officiers dans les vignes devant Mauvannes. Une compagnie du premier échelon déborde la route nationale par le Sud ; le capitaine et le sous-lieutenant commandant la section de tête sont blessés par le même obus
Un adjudant et des tirailleurs sénégalais qui viennent leur porter secours sautent sur des mines dans cette vigne d’enfer truffée d’engins explosifs dont les fils se noient parmi les fils de fer des souches et parmi le feuillage Les brancardiers qui arrivent ensuite sautent eux aussi sur des mines en évacuant les blessés. Le capitaine sera blessé trois fois mais s’en tirera (Capitaine PARISSON , Sous-lieutenant GRANIER , Adjudant SAULI ) .
Malgré ces pertes le bataillon peut bientôt reprendre ses reconnaissances sa progression et son occupation du terrain en vue de l’attaque du 20 août dans la journée Le Génie passera la nuit à déminer.
Le 20 , l’attaque démarre au petit jour , appuyée par la Marine et les batteries de 105 et 155 de l’Artillerie divisionnaire (1e RA).
Au Nord, le BM 5 se lance à l’assaut du Mont Redon et l’enlève après une lutte opiniâtre. II s’y maintiendra jusqu’au soir malgré de nombreuses et meurtrières contre-attaques allemandes .
A sa droite le BM 11 progresse en direction de La Crau et s’empare de deux collines fortifiées. Toute la position extérieure ennemie est complètement enfoncée et la liaison avec le Combat Team de la 9e DIC a pu être prise.
Le CT 9e DIC s’établit vers Solliès, La Farlède prêt à s’engager pour conquérir le Coudon et La Valette . De ce côté tout va pour le mieux malgré des pertes sensibles. Au sud, le BIMP, après avoir traversé le Gapeau vers la Brevette et l’Oratoire, progresse en direction des Maurettes . Le commandant de la 1e compagnie des volontaires du Pacifique ( capitaine PERRAUD ) tente, en pleine nuit, d’enlever la cote 186,3.
La section du Lieutenant BELLEC échoue devant l’importance des organisations de l’ennemi qui réagit et ne lance pas moins de six contre-attaques qui sont repoussées par la 1ère compagnie accrochée au rebord des falaises.
Le 21 à trois heures du matin, nouvelle tentative sur la cote 186,3 qui échoue une fois encore .
Plus au Sud, dans la plaine, la droite du BM 24 est stoppée devant le Golf-Hôtel par un feu violent. A gauche de la route, le Gapeau est franchi mais les tirs d’arrêt de l’artillerie interdisent de pousser plus en avant. Le sergent – major METROT , qui a remplacé le sous-lieutenant GRANIER à la tête de sa section, est tué.
Le 20 à 20h30, tout le BM 24 très éprouvé doit s’arrêter.
Pendant cette progression, le BM 21, selon les ordres reçus, est arrivé sans encombre au plus près de la compagnie de gauche du BM 24. Le capitaine FOURNIER demande et obtient l’autorisation de dépasser. Profitant de l’obscurité, tout le Bataillon s’infiltre tout le long de la voie ferrée du chemin de fer de Provence, par sections successives, malgré les réactions de l’artillerie allemande.
Le 21 à 1 heure du matin , la 3e compagnie atteint l’école d’horticulture , surprend et nettoie un avant-poste. Les autres compagnies continuent la manœuvre de dépassements successifs et, de proche en proche, occupent tout le quartier des Grés, après de nombreuses actions de nettoyage coûteuses à cause de la nuit.
A 6 heures, une patrouille de la 2e compagnie pénètre dans la caserne Vassoigne. En cette matinée du 21 août, le Bataillon engagé en flèche occupe le faubourg Est de la ville, en position très inconfortable, au contact direct de résistances qu’il ne réussira à faire tomber que vers 10 heures.
Sans liaisons latérales, sans axe de ravitaillement, bombardé et mena ce d’être pris à revers par les éléments ennemis qui prennent sous leur feu le P.C. et les équipes de brancardiers. Mais Hyères est atteinte.
Ce même 21 au matin, le BIMP monte une troisième attaque contre la cote 186,3. A 9h30, un tir de préparation d’artillerie se déclenche : 5 minutes de 155 ni/m sur les barbelés, 5 minutes de 105 m/m pour serrer au plus près, 5 minutes de fumigènes pour l’assaut et, à 9h50, l’objectif est occupé par la 1e compagnie précédée par la section BELLEC . Toute la garnison est capturée dans les 3 étages et l’observatoire de l’ouvrage, dans les abris souterrains qu’elle n’ a pas eu le temps de quitter par les deux issues d’évacuation creusées à même le schiste et débouchant sur les pentes Nord-Ouest. Bilan : 85 prisonniers dont deux officiers.
Par cette action décisive, le massif des Maurettes est pratiquement conquis et nettoyé.
Pendant ce temps, le Golf-Hôtel, vaste cube de maçonnerie aménagé en forteresse , hérissé d’armes automatiques , entouré de barbelés interdit la route qu’il est indispensable d’utiliser. Le BM 24 toujours au contact, ne peut plus progresser.
C’est alors que le Chef de bataillon GORIAUX , commandant la compagnie antichars (C.A.C.) organisée en compagnie d’assaut, reçoit l’ordre de l’enlever. Pour cette action , il disposera d’un appui de feu important qui , outre l’artillerie divisionnaire (1e RA), comprendra pour Inaction au plus près , une section de canons d’infanterie (CCI), un peloton de chars Destroyers du 5e RCA et un escadron du 1e RFM. Protégée par un déluge de feu, la progression commence et, à 10 heures, le Golf-Hôtel est cerné. Mais il parait défier nos obus; ses mitrailleuses sont intactes et le prouvent qui, avec un tir violent de « barrage sur les pentes des abords immédiats, stoppent le mouvement en avant.
Cette nouvelle attaque est repoussée avec des pertes sensibles, le Commandant de la CAC est parmi les blessés; une nouvelle opération doit être montée.
Le BIMP, que son succès rend partiellement disponible malgré sa fatigue et qui , sur la cote 186,3 se trouve en situation plongeante privilégiée lui permettant d’attaquer le Golf-Hôtel sur ses arrières, reçoit cette mission et se prépare à l’exécuter.
Vers le Sud du dispositif, au début de l’après-midi, le BM 21, après avoir consolidé ses positions, reprend sa progression. Son objectif : le Sud-Ouest de Hyères, quartier de la gare SNCF et de la Croix de Fer. Il s’avance dans la « basse ville, déjà pavoisée sous les yeux des Allemands i pratiquement sans obstacle, sauf des accrochages au Petit Séminaire et au Jardin Olbius Riquier, ralenti seulement par la population qui est sortie dans les rues.
L ‘ennemi, retranché sur les hauteurs de Costebelle, balaye les abords de la gare et c’est sous un feu intense de mortiers et de mitrailleuses que la compagnie MARNAY atteint ses objectifs au prix de pertes élevées. Les habitants qui assistent à cette opération se prodiguent sans compter pour secourir les blessés qui, sous les balles, sont immédiatement relevés, pansés, évacués par des infirmières bénévoles et très efficaces.
Ne pouvant plus progresser de front, une fraction de la CAC et le BM 24 parviennent, par infiltrations, à passer devant le Golf-Hôtel en partie aveuglé par nos tirs. Traversant le Nord de la ville et l’artère principale sous l’accueil enthousiaste des habitants, ils atteignent les limites Ouest vers 18 heures.
HYERES est donc libérée le 21 août 1944
Revenons auprès du BIMP, dont son commandant le capitaine MAGENDIE a reçu l’ordre de conquérir le Golf-Hôtel par le Nord et qui organise un détachement d’assaut composé de la section de pionniers, de 3 sections de la CAC et des 1e et 3e compagnies.
EXTRAITS DU JOURNAL DE MARCHE DU BIMP
Le capitaine commandant le Bataillon commandera le coup de main car la préparation des hommes n’a pu être faite comme il serait désirable. Seuls les officiers reçoivent des instructions particulières. En ce qui concerne les hommes, ils devront suivre aveuglément leurs officiers.
Un tir d’artillerie « double massue » est demandé : 3 minutes de 155 a/m pour permettre la création des « brèches dans les « barbelés et la progression des sections , de la cote 186,3 jusqu’à 500 mètres de l’Hôtel. Deux minutes d’arrêt puis 3 minutes de fumigènes pour le franchissement des réseaux de barbelés et l’assaut final.
Mission des groupements :
Groupe n°1 – Lieutenant SALVAT – Nettoyage du rez-de-chaussée, entrée par la salle à manger vitrée
Groupe n°2 – Sous-lieutenant LOAREC – Nettoyage du 1e étage, entrée par la porte principale.
Groupe n°3 – Sous-lieutenant DUCHENE – Nettoyage du 2e étage et bouchon vers les étages supérieurs.
Groupe n°4 – Lieutenant MALFETTES – Nettoyage du rez-de-chaussée et bouchon vers les caves.
Groupes n°5 et n°6 – Sous-lieutenant MORAND – Nettoyage des jardins.
Groupe n°7 – Surveillance des étages -supérieurs.
Groupe n°8 – Capitaine MAGENDIE – Recherche du souterrain.
La section en réserve, aux ordres du sous-lieutenant DELSOL , recevra la mission de la section de pionniers qui , au cours de la préparation d’artillerie, sera mise hors de cause (Deux tués, dont le lieutenant MULLER commandant la CP et neuf blessés, dont le sous-lieutenant MORAND et l’adjudant-chef PETRE ).
A 19 heures, l’opération est entièrement terminée. Cent soixante prisonniers sont faits dans les jardins et dans le souterrain, dont une quarantaine de blessés. L’ennemi a eu plus de vingt morts.
Le Général BROSSET arrive vers 20 heures, félicite les blessés prisonniers mais leur dit aussi qu’il y a plus fort qu’eux : » les Français « .
Dans l’ouvrage « La France et son empire dans la guerre », tome 3 , le commandant MAGEND IE affirme dans son témoignage « le Golf-Hôtel » : » ALLARIA , un jeune Italien- Pierrot déjà pour tout le bataillon – nous a servi de guide et a fait de l’hôtel une description très détaillée
Grâce à la prise du Golf-Hôtel , les éléments de la CAC et du BM 24 que nous avons laissés en progression vers la sortie Ouest de la ville , poursuivent leur avance mais sont arrêtés à la Poterie par des tirs d’ artillerie allemande provenant des batteries de Saint-Jean, du Château Jaune et du Beauvésé qui leur tirent dessus ainsi que sur la ville.
Quelques centaines d’obus tombent sur le quartier des Iles d’Or et sur l’hôpital, d’autres un peu partout.
Il y a eu, dans la nuit, deux tirs de représailles sur la ville délivrée : un à 18 heures qui fit des victimes et un, autre à 1 heure du matin.
La progression reprend cependant de part et d’autre de la Nationale 98 vers Toulon et le long des crêtes des Maurettes.
Les Allemands, en débandade, se replient vers le carrefour de la Bayorre, nais, dans la soirée, installent des mortiers de 75 m/m de part et d’autre de la route nationale. Des fantassins attaquent de suite après les tirs et ne font cependant que retarder l’avance car, durant la nuit, il décrochent et, le 22 août vers 6 heures du matin , les troupes françaises occupent la Bayorre vidée de ses occupants.
Au Nord le BM 11 après avoir occupé deux collines fortifiées devant La Crau, continue sa progression en réduisant toutes les résistances et améliore ses positions en vue de l’attaque prochaine de La Crau. Il assure la liaison avec le Combat Team de la 9e DIC alors en progression vers La Valette et qui, dans la journée, s’est approché puis emparé du Coudon.
Le BM 5, durement éprouvé au Mont Redon, nettoie ce massif important puis, devenant disponible, est chargé, le 22 août, de s’occuper du nettoyage de l’ile de Porquerolles et de la presqu’île de Giens avec les éléments FTA et les FFI.
Le Général BROSSET a en effet décidé d’exploiter sans tarder le succès initial du RCT 2 et , dans la nuit du 20 au 21 août ,lui fait engager le BM 4 tenu en réserve jusque-là entre le BM 5 et le BIMP pour déborder les résistances qui arrêtent le RCT 3 et en lui faisant contourner les pentes Sud et Ouest des Maurettes, par le Plan du Pont et le Fenouillet .
A la fin de la journée du 21 , après avoir assuré la liaison avec le RCT 3 à la sortie Ouest de Hyères, mission accomplie, il est de nouveau axé sur l’objectif du RCT 2, c’est-à-dire La Crau.
Pour protéger ces diverses opérations, le 22e BMNA du RCT 1, tenu en réserve, est dirigé vers la ferme Beaulieu, au nord du dispositif sur la route G.C.58 de Solliès-Pont aux Martins, à 1 500 mètres au Nord de La Castille, et reçoit la mission de couvrir les arrières du RCT 2 (BM 11 et BM 4) en se tenant prêt à intervenir en appui et en exploitation.
Le 1e Bataillon de Légion Etrangère du RCT 1 assure les arrières Sud du RCT 3 face aux débouchés du Mont des Oiseaux et de la presqu’ile de Giens; une partie de ses éléments gravit et occupe le plateau de Costebelle.
Les Allemands de la Kriegsmarine se replient vers le Mont des Oiseaux, d’autres vers La Garde, par le versant Nord du Mont des Oiseaux et du col du Serre.
Le 22 août, au petit jour, l’attaque reprend. Précédés de leurs éléments blindés, les deux RCT reprennent la progression.
Dès 6 heures, le BM 11, épaulé au Nord par le 22e BMNA et au Sud par le BM 4 occupe La Crau où il reçoit un accueil enthousiaste puis, continuant son effort, vers midi il s’empare (en y perdant son troisième commandant de compagnie en deux jours) des cotes 79.2 et 753, éperons avancés du Massif du Thouar d’où une furieuse contre-attaque allemande est stoppée grâce à l’action efficace du groupement de chars du RFM qui perd son chef le maître LEGOFFIC.
Le BM 4 progresse en direction du Thouar, en liaison avec le RCT 3 qui, toujours axé sur la RN 98, se dirige vers Le Pradet et La Garde.
Le BM 21 s’empare du Pradet et pénètre dans La Garde, mais une contre-attaque le rejette.
A la nuit, le BIMP prendra La Garde d’assaut malgré de très lourdes pertes.
Le 22e BMNA, après son action au profit du BM 11, a reçu une direction Sud et, par La Moutonne, vient prendre à revers les pentes Sud du Mont des Oiseaux par le col du Serre, aide à libérer Carqueiranne où les Arméniens luttaient avec les F.F.I. depuis le 21 contre les Allemands.
350 soldats et marins ennemis venus du Mont des Oiseaux, sont attaqués et faits prisonniers vers le tunnel de San-Salvadour par les unités venues de Hyères par les Pentes Sud et la route du bord de mer.
Carqueiranne est libérée le 23 août au petit jour.
Dans la matinée du 23, la garnison du Mont des Oiseaux, que le 1e Bataillon de Légion Etrangère laissé en arrière avait pour mission de couvrir, s’est rendue après avoir subi un sévère pilonnage de la Flotte et de l’artillerie de terre du 1e R.A.
Nous avons laissé le BM 5 avec mission du nettoyage des résistances, avec l’aide des Forces Françaises de l’Intérieur.
Une compagnie du BM 5 va attaquer et conquérir la presqu’île de Giens.
Pendant ce temps, dans la soirée du 22 à 16h45 le groupe de maquisards du lieutenant VALLIER (par la suite lieutenant SIVIRINE Gleg à la 1e DFL) occupe la route de la plage, empêchant toute infiltration venant de la presqu’île de Giens.
A 20h15, il intercepte deux civils qu’il identifie comme étant des Allemands et qui, après interrogatoire, se décident à signaler qu’il reste, à La Badine et à Giens, 150 à 160 hommes environ.
Le lieutenant VALLIER, au bluff, devient-le Colonel commandant les troupes françaises d’occupation de Hyères qui envoie un des deux prisonniers en parlementaire auprès du commandant allemand du secteur de Giens et l’informe que si la garnison ne se rend pas dans les 8 heures qui viennent, il déclenchera les tirs de destruction prévus par terre et par mer. Le cycliste revient avec l’accord signé et, à 8 heures du matin, par échelon, la garnison au complet se rend aux 38 maquisards.
Ce qui permet aux Sénégalais du BM 5 de retour de Porquerolles, d’occuper la presqu’île sans aucune perte.
Le 23 au matin, la libération de tout le territoire d’Hyères est pratiquement terminée .
La 1e DFL a rempli la première phase de sa mission. Il reste encore Toulon.
La 3e Division d’Infanterie Algérienne (3e DIA) occupe déjà les faubourgs Ouest de Toulon et s’emploie à nettoyer les hauteurs qui dominent la ville et qui sont autant de nids de résistance à réduire , et en particulier le Mont Faron.
Le 22 août, les unités engagées avaient espéré se retrouver le soir dans Toulon mais elles se sont heurtées à une seconde et dernière ligne de défense qui couvre les abords immédiats de la place.
L’Ouest du Pradet et Sainte – Marguerite, le Pont de la Glue, Sainte-Musse et l’Ouest du village de La Garde, avec les hauteurs du Thouar, constituent des points d’appui fortifiés contre lesquels est venue se heurter notre progression en fin de journée.
Laissons parler le Général de Lattre de Tassigny :
— Le 23, appuyés comme les jours précédents, par les blindés du 1e RFM et les Destroyers des Chasseurs d’Afrique, les fantassins de la Division BROSSET repartent à l’assaut. Sur les hauteurs du Thouars, clefs de la position, l’ennemi est enfermé dans de solides organisations. Ses canons tirent à vue directe sur notre infanterie. Ils sont écrasés par nos 155 m/m et l’adversaire fait sauter les quelques pièces intactes qui lui restent. De part et d’autre, les pertes sont lourdes :
- 800 tués ou prisonniers chez l’ennemi
- 250 hommes hors de combat dans nos rangs. Dans deux bataillons seulement, le BM 4 et le BIMP, 13 officiers restent sur le terrain, tués ou blessés
Oui, cette dernière action fut dure, très dure.
Au matin du 23, les missions des RCT sont ainsi définies : le RCT 2 doit réduire le bastion formé par le Massif du Thouar pour permettre la progression du RCT 3 qui opère en plaine, tandis qu’au Nord de la Division les éléments de gauche du RCT de la 9e DIC doivent lier leur action à celle du RCT 2 en attaquant les défenses du village de La Valette.
L’attaque démarre à 9 heures.
Le BM 4 est chargé de nettoyer les pentes Nord et la crête du Thouars, tandis que le BM 5 réduira les escarpements Sud. Le terrain couvert et accidenté contrarie l’avance, retardée par ailleurs par les violents bombardements des batteries protégées et les organisations d’infanterie fortement défendues. Notre artillerie appuie l’action au maximum ; l’incendie se déclare et s’empare des bois de pins et des buissons et c’est au milieu des flammes et dans le vacarme des explosions de dépôts de munitions que l’ennemi fait sauter que se poursuit la progression.
Vers 15 heures, les deux bataillons, harassés mais victorieux, occupent l’ensemble du massif d’où l’ennemi s’enfuie en abandonnant ses batteries et de nombreux prisonniers.
A 15 heures, le BIMP se met en marche, s’empare de la cote 46,2 et s’aligne à la Noté et au clos Pouverel Le BM 21 atteint le Pont de la Clue et réduit les cotes 25,8 et 28,2.
Dans Toulon, le Chef de Bataillon MIRKIN de l’Etat – Major de la Division, -vient d’obtenir au bluff la reddition de 600 Allemands retranchés à l’arsenal de terre, ce qui permet aux premiers éléments de la division de pénétrer dans la ville et de faire leur jonction avec ceux de la 9e DIC venus de la Valette .
La journée du 24 sera consacrée aux derniers nettoyages indispensables des quartiers Est de Toulon.
La 9e DIC s’empare des forts du Mourillon, de Lamalgue et de Saint -Mandrier, appuyée pour ce dernier objectif par la 5e batterie de 1e EAC qui tirera les derniers coups de 105 m/m sur Saint-Mandrier.
Le BM 21 décide par téléphone les garnisons des forts de Carqueiranne et de Sainte – Marguerite à se constituer prisonniers : 26 officiers et 850 hommes de troupe .
Le 22e BMNA nettoie le Cap Brun, y capturant aisément-les derniers défenseurs ennemis.
Le 24 août, la 1e DFL a rempli totalement sa mission.
Laissons la conclusion au Général de Lattre de Tassigny :
► En fin de journée, l’essentiel de la position ennemie est entre nos mains; les éléments légers de la 1e DFL pénètrent dans Toulon par Saint Jean du Var, mêlés aux unités de la 9e DIC qui viennent de s’ emparer de La Valette après une lutte aussi ardente que celle qui s ’était déroulée sur la crête du Thouar.
Enfin, le 24 août, la Division BROSSET achève le nettoyage de la région de Sainte – Musse et du littoral, entre le Cap Brun et Giens, et fait capituler tous les ouvrages côtiers.
le 24 août , elle se regroupe dans la région d’Hyères.
Après avoir durement lutté pendant plus de quatre jours et quatre nuits contre un ennemi qui s’est défendu pied à pied avec acharnement , après avoir abattu l’adversaire , l’avoir forcé dans ses retranchements , lui avoir infligé des pertes sanglantes et fait plus de 4 000 prisonniers; après avoir elle-même laissé près de 900 des siens, dont cinquante officiers, sur les pentes du Mont – Redon, devant le Golf – Hôtel de Hyères et sur la crête du Thouar, la Division BROSSET, sans un instant de répit, va courir au Rhône, franchir le fleuve sur des moyens de fortune, puis se porter à marches forcées sur Lyon et poursuivre son destin glorieux » –
Ce destin glorieux commence à Bir-Hakeim , poursuivi à El-Alamein avec l’Himeimat.
A cette époque, la Division avait encore, comme élément de reconnaissance, le 1e Spahis Marocains sur automitrailleuses et canons de 75 m/m antichars sur camion plus un escadron de chars.
La preuve est sur le terrain, ou plutôt dessous : ainsi le lieutenant CANDI , tué sur les pentes de l’Himeimat alors qu’il affrontait avec son automitrailleuse les chars de la Division Ariete. Ainsi, l’adjudant-chef NOËL, qui n’a pas hésité avec son automitrailleuse à aborder un char et qui le réduisit à l’impuissance.
Ces unités de chars et de cavalerie nous furent enlevées en Tunisie pour participer, au Maroc, à la formation de la 2e Division Blindée et, sans la ténacité de nos chefs qui ont refusé la dissolution de la 1e Division Française Libre constituée depuis Bir-Hakeim, nous aurions subi le même sort.
C’est ainsi que le 1e RFM, tout d’abord DCA de la Division, devint, après instruction intense à Bou–Ficha, le magnifique Premier Régiment de Fusiliers Marins.
Hors des combats, nous n’étions pas toujours disciplinés; notre chef le savait, mais il savait par-dessus tout qu’il pouvait compter sur nous et nous le lui avons toujours prouvé.
ALGER. 14 juillet 1943
Le Général DE GAULLE préside une prise d’armes sous des ovations sans fin.
A sa gauche se trouve Mr Robert Murphy, délégué du président Roosevelt, qui lui dit !
— Quel spectacle réconfortant, et comme je me sens Français depuis treize ans ! ?
— Eh bien ! moi, monsieur, je me sens Français depuis deux mille ans « , lui répond le Général.
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