*LA BATAILLE POUR TOULON
**L’ASSAUT FRONTAL
Ces pages préliminaires (Lien) résumant ce que fut le Débarquement en Provence nous permettent de consacrer, maintenant, l’essentiel de cette brochure à la mission assumée par la Première Division Française Libre, sous les ordres du Général Diego BROSSET, pour la libération du littoral varois et de ses habitants.
Après avoir longtemps combattu seule, dès 1940, ou aux côtés des Armées anglaises en Afrique, la 1e DFL fut versée dans la Première Armée Française, avec quelques unités ayant déjà fait leurs preuves en Italie : 9e DIC, 3e DIA et 5e DB sous les ordres du Général de LATTRE de TASSIGNY, la Ie Armée Française comprend essentiellement deux groupements :
Le groupement du Général de MONTSABERT 3e DIA (Division d’Infanterie Algérienne).
Le groupement du Général de LARMINAT : 1e DFL et 9e DIC
Après que l’ouverture de la tête de pont eût été faite sur la côte varoise, le 15 août 1944, par les Commandos français et américains, le groupement de LARMINAT débarque à Cavalaire, aidé par les résistants des Forces Françaises de l’Intérieur, le 16 août.
La mission principale confiée à ce groupement est d’anéantir et de nettoyer les défenses allemandes de la côte pour libérer Toulon.
Couverte sur sa droite par les régiments de la 9e DIC, la 1e DFL est engagée immédiatement sur le bord de mer.
Les deux groupements (de MONTSABERT et de LARMINAT) ont reçu comme itinéraire et comme mission :
Pour le Groupement de MONTSASERT :
3e DIA (Division d’Infanterie d’Afrique), vieille compagne de la campagne d’Italie, reçoit l’ordre de se porter en direction de Collobrières – Cuers , avec comme mission d’encercler Toulon par le Mont Caumes, le Beausset, Bandol et d’attaquer par l’Ouest en couvrant l’ opération par le Nord .
Pour le Groupement de LARMINAT :
9e DIC (Division d’Infanterie Coloniale ). Le premier régiment débarqué venant de Corse, organisé en Combat Teams, rejoint le 19 août dans la journée et, avec l’aide des Commandos d’Afrique et du Bataillon de choc regroupés, reçoit la mission de s’intercaler entre la 3e DIA et la 1e DFL pour attaquer Toulon par le Nord, axe Solliès-Pont -La Farlède – La Valette, réduisant les résistances extérieures tout en maintenant la liaison entre les deux groupements.
1e DFL (Division Française Libre) qui a relevé, dès le 18 août, les Commandos français au contact de l’ennemi et la 3e Division U.S , en particulier le 1/17e R.I. US , au fort de Mauvannes , s’établit sur les hauteurs dominant les plaines du Real Martin et du Bas-Gapeau , qui vont en s’infléchissant vers l’Est jusqu’à La Londe et la mer .
Sa mission :
Le Général de Lattre de Tassigny, le 21 août 1946, dans une allocution prononcée à Hyères lors de l’inauguration de la stèle commémorative l’a ainsi définie :
► La mission confiée à la 1e DFL est particulièrement rude. Elle doit, avec l’appui de tous ceux de la Flotte et de l’aviation, attaquer le camp retranché de Toulon par sa face la plus redoutable, la face Est, pour saisir l’ennemi à la gorge pendant que le Groupement de MONTSABERT lui portera le coup de poignard dans le dos en encerclant la place par le Mont Caumes, Le Beausset et Bandol » –
Après tant d’autres, en Afrique, en Italie, la 1e DFL allait mener son premier combat sur le sol de France.
Composition des éléments engagés :
La 1e DFL, commandée par le Général Diego BROSSET, était une division d’Infanterie Motorisée, capable de déplacer son personnel et ses matériels par ses propres moyens, soit en bloc, soit par fractions se suffisant efficacement à elles-mêmes.
Ayant combattu, depuis 1940, aux côtés des troupes anglaises luttant en Afrique contre les Allemands et les Italiens, elle venait , plus récemment, d’Italie où elle avait participé à la bataille du Garigliano, Ponte Corvo, Rome , Bolsena, Radicofani.
En vue du débarquement en Provence , elle fut regroupée , recomplétée, renforcée puis dirigée sur les ports italiens de Tarente et Brindisi pour être embarquée avec d’autres unités .
Au large de Naples, elle avait rejoint l’armada de débarquement qui, en convoi, s’était enfin dirigée vers les côtes de France. Ses premiers éléments débarquent dans la baie de CAVALAIRE dans la nuit du 16 au 17 août 1944, le reste au petit matin du 17. Le matériel débarqué à Saint-Tropez arrive et tous les éléments se mettent en route pour aller relever les premières troupes américaines et les Commandos de débarquement au contact de l’ennemi qui s’est replié vers Toulon et son redoutable camp retranché.
Elle est composée de trois Brigades d’infanterie à trois bataillons, d’un régiment de reconnaissance et d’appui à trois escadrons et un escadron de chars légers , d’un régiment d’artillerie à trois groupes de pièces de 105 m/m, à trois batteries et un groupe de 155 m/m .
Pour soutenir, renforcer et ravitailler cet échelon de combat, elle utilise le. bataillon du Génie, la compagnie du Train avec le détachement de circulation routière (les M.P.) , la compagnie de transmission et le groupe de DCA , la compagnie de réparation divisionnair , le groupe d’exploitation de l’Intendance et du Service de Santé , l’Ambulance Hadfield Spears et l’ambulance chirurgicale légère. En renfort depuis l’Italie, le 8e RCA, avec ses chars Destroyers, constitue la réserve de protection lourde, antichar et de poursuite. Dès le débarquement, elle s’articule en trois unités mobiles de combat.
Chacun de ces RCT (ou Régiment Combat Teams ) se compose d’une brigade à trois bataillons, de son groupe d’artillerie, de son escadron de reconnaissance et d’appui.
La 1e Brigade comprend la 13e demi-brigade de Légion Etrangère (13e DBLE) et le 22e Bataillon de Marche Nord-Africain (22 BMNA) sous les ordres du Colonel DELANGE et devient le RCT 1 .
La 2e Brigade comprend les trois Bataillons de Marche (BM 4, BM 5 et BM 11 , sous les ordres du Colonel GARBAY et devient alors le RCT 2.
La 4e Brigade comprend le BM 21, le BM 24 et le BIMP ( Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique ) sous les ordres du Colonel RAYNAL et devient le RCT 3.
L’axe de la Division est la route nationale n°98 de Saint-Raphaël à Toulon.
Le Général BROSSET, pour exécuter sa mission, confie le Nord de cet axe au RCT2 qui prendra et assurera la liaison avec le RCT de la 9e DIC vers Pierrefeu, avec comme tâche d’attaquer en force la position du Mont Redon et d’exploiter au Nord et au Sud de ce massif, de manière, en contournant les Maurettes, à se trouver sur l’objectif numéro 1 et les hauteurs dominant le village de La Crau, et à assurer la liaison avec le RCT 3 vers le Sud puis vers la sortie Ouest de Hyères.
Le Commandant du RCT 2 décide de donner la mission de liaison au Nord au BM 11 avec comme tâche de progresser en direction de La Crau en réduisant les résistances allemandes qui défendent le village. L’objectif du BM 5 sera de conquérir le Mont Redon et de nettoyer les alentours.
Le BM 4, maintenu en réserve entre le BM 5 et le BIMP du RCT 3 se tiendra prit à intervenir entre le Mont Redon et les pentes Sud des hauteurs constituées par les Maurettes. Au RCT 3 il confie le Sud de cet axe, en se tenant à cheval sur la RN 98, avec la délicate mission d’enlever le massif des Maurettes et la ville d’Hyères, garder la liaison au Nord avec le RCT 2 , puis exploiter en direction de La Garde .
Il tient le RCT 1 en réserve pour un appui éventuel et l’exploitation, le 2e Bataillon de Légion, occupé aux derniers débarquements du matériel, n’ayant pas encore rejoint en entier.
Dans la nuit du 19 au 20 août, l’artillerie s’installe au plus près, dans la plaine, pour appuyer l’action des deux RCT engagés. Le Génie en première urgence devra déminer le passage du Gapeau, au gué que les basses eaux laissent praticable, à quelques centaines de mètres en amont du pont de la RN 98, et assurer le déminage des routes de la rive gauche du Gapeau et la route de HYERES.
Les chars se tiendront prêts à intervenir, soit comme appui d’artillerie en tirs directs, soit en poursuite.
L’attaque sera préparée par l’artillerie navale qui comprend, outre trois croiseurs américains et un croiseur anglais, La Gloire, le Georges-Leygues et l’Emile Bertin. Elle assurera, jusqu’au 24 août, un appui considérable et d’une grande efficacité par les destructions qui démantèleront les blockhaus allemands et par l’effet démoralisant qui frappera un ennemi harcelé de toutes parts par l’infanterie de nos Bataillons de Marche.
Le 19 août , le PC du Général de Lattre s’installe à Pierrefeu. Le PC du Général BROSSET s’installe à. La Londe ; quant à lui-même, le Général BROSSET se tient, comme toujours, auprès des unités engagées dans ce qui va devenir une rude bataille.
Le Commandant du RCT 3 décide d’engager deux bataillons et d’en maintenir un en réserve d’intervention ou d’appui.
Le BIMP, au Nord, reçoit comme mission de franchir de vive force le Gapeau et de conquérir le massif des Maurettes en débordant vers la Bravette et l’Oratoire, en particulier la cote 166,3 qui, avec le Golf-Hôtel, constitue l’un des points les plus fortifiés des Allemands dans la défense de la ville d’Hyères.
Le BM 24, à cheval sur la RN 98, devra traverser le Gapeau, s’emparer du Golf-Hôtel, véritable forteresse, et, par le Sud, déborder l’ennemi en direction de l’agglomération hyéroise.
Le BM 21, gardé en réserve pour l’exploitation et un appui éventuel, devra serrer au plus près derrière la compagnie formant l’aile gauche du BM 24 et se tenir prêt à intervenir immédiatement.
**SITUATION GéNéRALE
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Devant la Division, la plaine s’étend en glacis jusqu’au Gapeau ; les berges en sont minées et les deux ponts détruits. L’unique route est commandée par le Golf-Hôtel où l’on sait l’ennemi fortement installé et utilisant souterrains, casemates blindées et observatoires efficacement abrités.
Plus loin, la ville d’Hyères est dominée par des collines rocheuses : à droite, les Maurettes et le Fenouillet, à gauche, Costebelle et le Mont des Oiseaux. Des retranchements bétonnés sont aménagés sur ces hauteurs qui offrent, en outre, d’excellents observatoires L’artillerie ennemie, bien camouflée, est très active.
Telle est la position sur laquelle les Allemands nous attendent et que notre Division devra prendre d’assaut.
**L’INVESTISSEMENT DE TOULON
18-21 AOUT
Dans l’après-midi du 17 Août, l’Armée française se met en marche vers l’Ouest.
Le plan du général De Lattre est extrêmement osé. Un groupement commandé au début par le général De Larminat et comprenant la 1e Division Française Libre et la 9e Division d’Infanterie Coloniale attaquera de front le dispositif allemand pour créer un véritable abcès de fixation. Pendant ce temps, la 3e Division d’Infanterie Algérienne que commande le général de Goislard De Monsabert, renforcée du Bataillon de Choc, contournera Toulon par le Nord et se rabattra vers la mer au Nord-Ouest.
Le camp retranché sera pris dans une tenaille. Pour compenser la faiblesse de ses effectifs, De Lattre dispose d’appuis aériens et surtout des canons des marines alliées, l’amiral Ruhfus, lui, a dans sa manche une grosse carte, la batterie de 340 m/m du Cap Cepet. Deux pièces sur quatre ont été sabotées par les ouvriers de l’Arsenal mais les deux autres peuvent tirer à 34 kilomètres. C’est d’ailleurs à cause d’elles que les plages du débarquement ont été choisies si loin de Toulon.
**LA 1E DFL ATTAQUE DE FRONT
La 1e Division Française Libre a reçu la mission la plus périlleuse : elle est chargée d’enfoncer le côté le plus solide de la défense allemande. Ses hommes ont l’habitude des taches impossibles ; ils l’ont prouvé à Karen, Bir Hakeim, Takrouna, ou Garigliano. Ils ont porté sous tous les cieux la Croix de Lorraine.
Légionnaires de la campagne de Norvège, artilleurs, fusiliers-marins, marsouins venus d’Afrique Equatoriale, de Djibouti, de Nouvelle-Calédonie, de Tahiti, du Levant, des Antilles, ils représentent ce qu’on appelait alors » l’Empire des cinq parties du monde « .
Leur chef, le général Diego Brosset, taillé en athlète, toujours vêtu d’une saharienne et d’un short, s’est décrit lui-même en ces termes :
» J’entraîne ma Division comme une compagnie. Je saute sur les chars en marche, j’engueule Pierre et Paul, je dis merde aux obus et on avance. Je ne serai jamais un vrai général mais ma division est une vraie division « .
Le 18 Août, le Groupe de Commandos d’Afrique a enlevé la forte batterie de Mauvannes. Dépassant la ligne atteinte par les Américains, Brosset attaque le 20.
A droite, le Bataillon de Marche n°5 du capitaine Bernard (brigade Garbay) enlève le Mont-Redon, charnière de la défense, et repousse toutes les contre-attaques. Le BM 11 du capitaine Boucard, appuyé par le Bataillon de Marche Nord-Africain (22e BMNA) du capitaine Lequesne se heurte aux casemates bétonnées des Pousselons.
A la gauche de la Division Brosset, le BM 21 du capitaine Oursel et les Fusiliers-Marins du 4e Escadron (lieutenant de vaisseau Langlois), traversent le Gapeau et s’infiltrent dans la ville d’Hyères. Mais la 4e Brigade du colonel Raynal se heurte à l’immense bâtisse du Golf Hôtel, transformée en forteresse. Plusieurs assauts sont repoussés.
Enfin, le 21 , après un tir de plus de 500 obus déclenché par l’artillerie divisionnaire (colonel Bert), les 160 survivants allemands cèdent devant l’attaque d’une Compagnie du Bataillon du Pacifique (capitaine Magendie).
La ville d’Hyères est entièrement libérée par les marsouins du BM 21 et du BM 24 (capitaine Dulbecco).
Le 1e Bataillon de légionnaires du commandant de Sairigne (Brigade Delange) atteint le Mont-des-Oiseaux.
Le 23 août, « Montcalm », « Gloire », et Georgs Leygues » tirent depuis la rade d’Hyères sur les batteries littorales du Cap de la Mitre, de Sainte Marguerite et de
La « Lorraine » met trois coups au but sur le fort de Sainte Marguerite.
Le 24 août, le « Georges Leygues » atteint le fort Saint-Louis au Mourillon. L’effort se concentre sur Saint-Mandrier. Le « Montcalm, la Gloire », le « Fantasque » se joignent à la Lorraine « . Mais » Big One » continue à inspirer le respect et à faire le vide autour des imposantes gerbes de son unique canon en état de tirer.
Le 26 et 27 , tout le monde s’acharne sur Cepet. Le « Ramillie » anglais, avec ses 380 et le Duguay Trouin » avec ses 155 tirent pour la 1e fois sur « Big One « .
Dans la nuit du 27, les 1 800 allemands de Saint-Mandrier et leur amiral Ruhfus capitulent.
La flotte française a dépensé plus de 7 500 obus pendant cette bataille, xalisant des batteries de tout calibre ou ayant directement les troupes.
Le 13 septembre enfin, cette escadre glorieuse, suivie de bâtiments britanniques américains, fait une entrée triomphale dans ide de Toulon libérée.
Deux jours après le 15 Septembre, le général de Gaulle, Chef du Gouvernement , nt passer l’escadre en revue et parcourir î ville enthousiaste malgré ses profondes meurtrissures.
» Huit jours de luttes ininterrompues. De notre côté, 2 700 Français dont, 100 officiers tués ou blessés, chez les Allemands des milliers de cadavres et plus de 1 700 captifs. Un matériel énorme et un butin de centaines de canons. Finalement, le plus grand port de guerre de l’Europe Occidentale conquis et ouvert aux Forces Alliées pour servir de base à de nouvelles victoires.
Ce témoignage suffit à magnifier le courage de nos soldats. Mais leur fierté légitime ne saurait leur faire méconnaître l’appui trouvé auprès de la population varoise. Et je ne pense pas seulement à son accueil exaltant à sa complicité sympathique, je pense expressément à l’aide proprement militaire fournie par la fraction combattante de cette population enthousiaste .
Général de Lattre de Tassigny
Commandant l’Armée B – Histoire de l’Armée Française
Comments (3)
Alors qui aurait pris le commandement de l’assaut du Mont Faron si ce n’est Roland DOYEN devenu plus tard officiellement Libérateur de Strasbourg…!
Mon frère (9ème DIC) a pris une part active aux combats du débarquement de Provence.Il est mort à Villars sous Ecot le 11 septembre 1944.
Dommage que l’assaut de la poudrière de ST Martin gros morceau de la défense de Toulon soit éluder ou non mentionner le 22 Aout car se fut un carnage et haut fait du bataillon de choc